Chère piscine
La mise aux normes de la piscine Maurice Thorez à Montreuil va coûter 21,7 millions d'euros. La ville paie le prix fort pour accueillir l'entraînement du water polo lors des JO de 2024.
Est-ce l'amour du sport ou l'opportunité d'une communication fédératrice qui a poussé la municipalité à proposer l'une des deux piscines de la ville comme site olympique ? Retour sur le choix coûteux de la piscine Maurice Thorez de Montreuil pour héberger l'entraînement des épreuves de water polo lors des prochains JO.
La grand messe du sport amateur qui doit se tenir à Paris en 2024 devait aussi être l'occasion de permettre aux habitants un meilleur accès aux infrastructures nautiques. Ainsi était-il prévu la construction à Noisy-le-Sec d'un centre aquatique homologué proche du canal de l'Ourcq et d'une future gare du Grand Paris Express. Le financement de cet ouvrage, chiffré à 45 millions d'euros, est cependant partiellement bloqué par le territoire d'Est Ensemble présidé par le communiste Patrice Bessac, au motif de doutes sérieux sur la date de livraison prévue en 2023.
En contrepartie de l???abandon de ce projet, la Solideo, l'établissement public chargé de l'aménagement des infrastructures olympiques, a approuvé l???intégration de la piscine Maurice Thorez de Montreuil dans la liste des sites d???entraînement pour les JO. Une solution de repli généreusement proposée par le maire de Montreuil, qui n'est autre que Patrice Bessac, également président d'Est Ensemble. La Solideo a, au passage, approuvé une subvention de 2,5 millions d???euros pour la mise aux normes du site. Problème, le coût du chantier pourrait représenter près de 21,7 millions d'euros au total, montant qui risque d'impacter fortement les finances déjà fragiles de la ville. Car pour obtenir la fameuse homologation olympique, il est nécessaire de creuser légèrement un bassin et réaliser un cuvelage en inox, bassin pourtant déjà censé être olympique. Une opération pour laquelle les études montrent peu après qu'il sera aussi nécessaire de renforcer la dalle de soutènement de la pisicne. Par ailleurs, il est aussi prévu de diminuer fortement la consommation en eau et énergie de l'ouvrage pour le rendre plus écologique. Et sur les 21,7 millions nécessaires, la ville n'en aurait trouvé pour l'instant que la moitié, sous forme de subventions et d'emprunts, selon des élus d'opposition.
L'aspect financier n'est hélas pas le seul point épineux du dossier. Car les travaux nécessitent une fermeture annoncée de plus d'un an et demi de l'établissement, provoquant la consternation parmi les collectifs d'usagers. Les membres des clubs sont renvoyés vers d'autres équipements lointains du territoire avec des créneaux horaires restreints (cf l'intervention en Conseil municipal d'un collectif d'usagers dans la video infra). L'équipe de France de plongeon se voit elle aussi privée de son lieu d'entraînement, provoquant la colère de l???ancien champion d???Europe de plongeon Benjamin Auffret. « Les JO à la maison, c???est tous les cent ans. Maintenant, nos athlètes, nos plongeurs qui ont bossé toute leur vie pour ça se voient privés de leur lieu d???entraînement à un an de cet événement. Et on va leur réclamer des médailles » indique t-il sur son compte twitter. Enfin le sort des maîtres nageurs dont l'activité cesse faute de bassin, n'est pas non plus scellé.
Sans doute pour esquiver la responsabilité d'une décision périlleuse, la ville affirme par la voix d'Anne-Marie Heugas, conseillère municipale mais également vice-présidente en charge des sports d'Est Ensemble, que la rénovation de la pisicne était de toutes façons inévitable pour un ouvrage datant de 1966. Selon l'élue, la mise aux normes constituerai une bonne opportunité mais n'aurait pas été causée par les prochains JO (cf la video d'extrait du conseil municipal infra). Une argumentation dont il est cependant permis de douter, le stade nautique ayant déjà subi au cours de son histoire deux rénovations successives, l'une de près de 13 millions d'euros en 2006 et l'autre de 1,2 million en 2018.
Côté usagers, on indique qu'on aurait préféré se passer d'une communication olympique afin de pouvoir continuer à nager, les travaux de rénovation et notamment de réduction de l'emprunte carbone pouvant être étalés dans le temps sans nécessité de fermer 17 mois consécutifs afin de respecter une date butoir pour participer aux Jeux.